Stéphane Witzmann, coach professionnel, thérapeute et formateur, postfacier de mon livre, mon associé et compagnon au Jeu de la vie, signe ici son troisième article sur mon blog. Vous pouvez retrouver ici le premier, et là le deuxième.
Et si, au travail, vous aviez un chef tyrannique ?
Vous savez, quelqu’un qui vous donne des instructions ultra-détaillées à suivre à la lettre (et à faire pour hier même si vous êtes déjà débordé) puis qui contrôle que tout se passe comme il l’a prévu et râle dès que ça ne lui convient pas ? Vous connaissez déjà, c’est arrivé à vous ou à un de vos proches ?
Cette manière de faire, c’est ce qu’on appelle le micromanagement. Manager absolument tout sans laisser aucun espace de créativité ou de liberté d’action. Vient maintenant la question qui tue : qui apprécie(rait) de travailler dans ce climat, honnêtement ? On ne peut que finir par péter un câble si le trait est assez marqué.
Et pourtant, qu’y a-t-il de différent dans ce qui suit : « Jean-Bob, va chercher ton cartable. Et mets tes chaussures. Non, pas celles-là, les noires. Mais qu’est-ce que tu es lent pour mettre tes lacets ! Et n’oublie pas ton ticket de cantine. Tu l’as bien rempli à ton nom ? Mais fais-le punaise, on va être en retard. Allez ! Et ton blouson ? Si si, il fait super froid dehors ! Et je m’en fous qu’il gratte, mets-le on doit partir. Au fait, tu as révisé ta poésie ? Allez monte dans la voiture et récite-la moi. (etc) »
C’est bon, vous pigez le concept ? Et moi j’aimerais pas être à la place de Jean-Bob. Ni à celle de son parent d’ailleurs. Vous imaginez la pression ? La quantité de choses à ordonner, contrôler, surveiller, exiger, etc ? J’en deviendrais fou. Pas vous ?
Et pourtant, la réalité de nombreuses familles ressemble à ça. Probablement faute d’alternative plus sympathique en vue.
Dans la très grande majorité des cas (l’exception étant les personnes pour qui dominer l’autre est un kif), micromanager n’est pas une fin en soi. C’est un moyen. De s’assurer que (toutes) les choses à faire soient (bien) faites, et vite.
Dans un contexte de pression du résultat à court terme, je peux comprendre, ça paraît même plutôt une bonne idée faute de mieux. Si j’étais sur un bateau en train de couler et qu’un type apparemment compétent concernant la procédure d’urgence expliquait brièvement et de sang froid quoi faire, je pense que je suivrais à la lettre ses instructions (si tant est que ça ne me paraisse pas débile hein, je me méfie toujours des procédures).
Bon, si ça « marche » en cas d’urgence, quel est le problème et pourquoi s’en priver ?
Eh bien si on fait ça tout le temps, on retrouve l’organisation tayloriste du travail : un chef qui sait et décide de ce qu’il faut faire et des mains qui exécutent sans discuter. Tout le temps. Avec les problèmes qui vont avec ce paradigme. Typiquement, un ordre inapplicable car peu pertinent faute de connaissance du terrain (eh oui le manager n’a pas les mains dans le cambouis) sera refusé, ignoré ou contourné avec plus ou moins de subtilité. En parentalité, ça veut dire qu’une instruction allant en sens contraire des envies et besoins concrets et immédiats de l’enfant (« le terrain » dans la métaphore) prend le risque d’être rejetée (« NON »), retardée (« pas maintenant »), ou transformée en quelque chose de plus sympathique ou acceptable pour lui (devoirs bâclés par exemple). Et plus on insiste, plus la relation se détériore (pensez « syndicats »). Pas vraiment ce qu’on souhaite dans son cercle familial le plus proche, hein ?
Là où la comparaison s’arrête, c’est sur l’intention. Le management tayloriste n’a pas pour but de rendre les ouvriers autonomes après un certain temps passé dans la boîte. Imaginez l’encadrement qui dirait : « bon les gars, maintenant que vous savez vous débrouiller sans nous, on sert plus à rien alors on s’en va et on vous laisse l’usine, mais vous pouvez toujours nous appeler si ça va pas hein, bisous ». Ouais, ou pas. Pas dans le paradigme tayloriste en tout cas. Et c’est là où les choses sont différentes dans le contexte familial : l’enfant est voué à évoluer en dehors du contexte managérial parental, bref, à devenir autonome.
Et c’est quoi l’autonomie ? Mettre de manière robotique et sans qu’on le lui rappelle son blouson à 7h50, ses chaussures à 7h51, prendre son cartable à 7h58 (oui c’est long à faire les lacets nididiou)… prendre sa douche à 18h… et se coucher à 20h, bref, en d’autres termes, suivre à la lettre la procédure qui satisfait le parent ? Oh que ce serait pratique ! Mais quel est l’apprentissage de fond ici ? « Je fais ce qu’on me dit ». Pourquoi ? « Parce qu’on me le dit et qu’on me réprimande si je ne le fais pas ainsi ». Simple.
Pour moi, c’est l’antithèse de l’autonomie, même si en surface et à court terme, cela y ressemble.
La vraie autonomie, c’est quand on sait pourquoi on fait les choses. Pourquoi je mets un blouson le matin ? Parce qu’il fait froid. Pas parce qu’on m’a dit de le mettre. Ni parce qu’on m’a dit qu’il faisait « froid » (c’est parfois subjectif). Parce que JE juge qu’il est bon pour moi de me couvrir. Forcer l’enfant à mettre un blouson, c’est le priver de l’expérience essentielle (certes déplaisante et que je lui souhaite de courte durée) du « j’ai froid… punaise c’est désagréable, comment je fais pour que ça s’arrête… ah eurêka, le blouson ! ».
L’autonomie ici, c’est de savoir reconnaître ce qui se passe pour soi (« j’ai froid ») et de réagir en conséquence.
Soit via des valeurs sûres bien connues comme le blouson, soit via des solutions créatives, par exemple aller à l’école avec sa couette et/ou sa bouillotte. Pourquoi pas hein, ça se tente et c’est stylé.
En ordonnant une « solution », on passe à côté de toute la créativité et donc des potentielles meilleures idées que la procédure standard.
Souvenez-vous de votre dernier passage chez Ikea, là où le management à décidé que pour aller acheter une ampoule vous devriez vous taper 2 km de marche à travers tous les rayons même quand vous êtes pressé. Rageant, hein ? Ben c’est ça que ça fait que de suivre une procédure dont on se passerait bien et qui, sous couvert de satisfaire une partie de nos besoins (ampoule), en malmène un tas d’autres (efficacité, rapidité, etc). Mais c’est pour votre bien qu’on choisit pour vous, hein.
Les Tantine Berthe (cf le livre d’Evelyne Mester) diront que c’est bien beau tout ça mais que l’enfant est irresponsable et qu’il ne comprend pas les enjeux, etc… C’est donc normal de décider pour lui et de lui faire appliquer. Ce à quoi je réponds qu’il comprend très bien les enjeux qui le concernent. S’il est moqué par ses camarades à cause de sa couette de lit posée sur la tête, il apprendra très vite que le blouson est nettement plus « passe-partout » et discret socialement parlant.
Par contre c’est les enjeux des parents qu’il risque de ne pas prendre en compte, probablement, entre autres, parce qu’ils n’ont pas été dits. Eh oui, les ordres ne disent pas POURQUOI les gens les donnent. Et ce pourquoi n’est pas « parce que j’ai besoin que ce soit fait » : il y a toujours des intentions plus profondes, en particulier avec lesquelles ils sera infiniment plus facile pour l’autre d’avoir de l’empathie.
À quoi ça sert que l’enfant s’exécute ? Quel problème ça résout ? Ou quel problème auriez-VOUS (oui, pas lui) s’il ne le faisait pas ?
Bref, votre besoin à vous dans l’histoire. Un « va au bain dépêche-toi, vite vite le pyjama et les dents, non pas une si longue histoire, une courte, et tu éteins à 20h pile et je ne veux plus t’entendre » (et là je vous fais la version courte sans les rappels) devient ainsi : « j’ai envie de passer une soirée tranquille seul avec ta mère et pour ça j’aurais besoin de ne plus être sollicité à partir de 20h ». C’est plus simple non ? Et l’intention est explicite. On n’ordonne pas. On donne de l’information, et on laisse l’autre libre d’en faire ce qu’il veut.
Vous me direz probablement que c’est utopiste. Que même si l’enfant consent à vous écouter, qu’il semble même comprendre en quoi c’est important pour vous et que – ô miracle – il aurait envie de vous être agréable, que sa petite tête n’est pas neurologiquement équipée pour faire un rétroplanning et qu’il est en conséquence incapable de s’organiser pour vous laisser tranquille à 20h / partir habillé et équipé pour l’école à 8h / etc etc etc. Peut-être. Et ce sera absolument certain et sans aucune possibilité d’évolution et d’apprentissage si on ne lui en laisse pas l’opportunité. C’est là qu’on peut accompagner, suggérer des pistes (votre idée de rétroplanning par exemple), remercier pour tant de bonne volonté à votre égard, remarquer et célébrer ce qui a bien fonctionné, recycler ce qui a moins bien marché…
Donc oui, au début donner de l’information « marchera » a priori moins que d’ordonner. A priori… Car ordonner, est-ce que ça fonctionne vraiment ? Sans triche hein, ni carotte (un gain artificiel dont la simple existence prouve qu’il n’est pas suffisamment dans l’intérêt de la personne de s’exécuter en l’absence de compensation), ni menace (entre autres car les jeux de pouvoir sabotent la relation, mais aussi en ce qui me concerne parce que le simple concept me dégoûte). Honnêtement, peut-on forcer un ado qui fait la même taille que vous à prendre sa douche ? À part en lui injectant subrepticement un sédatif, en le traînant au sol et en le lavant ensuite vous-même, je ne vois pas comment.
Néanmoins, vous disposez d’un allié super efficace et que vous avez peut-être tendance à oublier ou sous-estimer : l’exposition aux conséquences naturelles. Je m’explique. Interdire à son enfant de sortir pendant trois jours car il vient de casser quelque chose (un verre, le jouet de sa sœur, votre voiture, choisissez ce qui vous parle) est une punition. En dehors de la décision de punir, il n’y a aucun lien causal entre les deux actes. Par contre, ne pas sortir au ciné avec l’enfant qui vient de crever (volontairement ou pas) un pneu de la voiture (pour le coup, j’ai choisi) est une conséquence relativement naturelle : en effet vous n’avez plus de véhicule fonctionnel pour y aller, ni peut-être la compétence, la disponibilité d’esprit ou le temps de bricoler une réparation, ni les finances pour prendre un taxi… ni non plus tout simplement l’envie de regarder un film avec votre progéniture parce que vous êtes en colère. Ça, c’est des conséquences naturelles. Il n’y a rien d’artificiel là-dedans, aucun lien causal fictif créé dans le but de punir. Juste vous, votre état d’esprit et votre voiture désormais non-fonctionnelle. On pourra aller au ciné un autre jour, mais là c’est foiré.
Pour vous donner un autre exemple, imaginons la situation suivante : votre unique loisir est l’aquaponey, toutes les semaines à 18h30 et vous y allez après avoir déposé votre enfant à son entraînement de canne de combat (ou en ses termes, sa formation de maître Jedi) à 18h15. Et pour pouvoir réaliser l’ensemble confortablement, vous avez besoin de partir de chez vous à 18h précises. Sachant que si vous arrivez un peu tard à l’aquaponey, vous tombez forcément sur une monture récalcitrante dont personne ne veut. Pas cool donc, mieux vaut être à l’heure pour profiter pleinement de votre loisir bien mérité. Bref, dans un paradigme micromanagérial, vous pourriez passer l’heure qui précède le départ à donner des ordres, vérifier, râler, etc, bref, dépenser une grande quantité d’énergie (avec son lot de charge mentale, c’est cadeau) afin de vous assurer que votre jeune padawan soit bien dans les temps, qu’il ait pris un goûter, qu’il soit pleinement équipé pour son sport… Ou alors, tout simplement, être au clair avec les règles du jeu en ce qui VOUS concerne : le départ est à 18h. C’est tout.
Alors oui, il est probable que ça ne se passe pas sans un minimum de casse au début, et que votre enfant ne soit pas dans le véhicule à 18h00 pétantes. Que la première fois, vous démarriez au final avec 15 minutes de retard (grrr), qu’il arrive sous-équipé et en retard à son sport, et que vous écopiez d’Alfred, le pire poney de la galaxie (qui tient à peu près la comparaison avec un sous-marin nucléaire : il vous immerge pendant un temps interminable tout en vous éjectant comme s’il tirait un missile longue distance). Conséquences naturelles : son sport se passe moins bien que prévu et le vôtre aussi, et ça se ressent tout le reste de la soirée sur vos humeurs respectives. La situation étant désagréable pour les deux parties, vous avez ainsi tout intérêt à faire mieux la prochaine fois.
Justement, comment pourrait se passer la semaine suivante ? Vous pourriez la jouer « en mode connard » et absolument sans les formes : vous décidez de ne pas vous sacrifier et lui expliquez que, jeune padawan prêt ou pas, vous partirez à l’heure. Vous offrez néanmoins votre soutien pour l’aider à s’organiser s’il le souhaite (cette distinction est importante). Il n’est pas là à 18h00 ? 18h01 ? 18h02 ? Eh bien vous partez. Notez au passage que je ne prône pas l’abandon d’enfants, je suppose ici la présence du conjoint ou un jeune suffisamment âgé pour être laissé seul.
Encore une fois, il n’y a ici aucune punition. Juste une personne qui propose d’offrir son temps et sa compétence (déplacement, assistance à l’organisation), et une autre totalement libre de prendre ou pas dans les termes proposés. Et qui vivent toutes les deux avec les conséquences naturelles de leurs actes responsables, sans aucun vol de responsabilité ni utilisation d’une quelconque autorité.
Un jeune Jedi suffisamment assidu fera le nécessaire pour continuer sa formation. Vous l’aiderez si besoin pendant quelques temps, à sa demande. Et vous direz définitivement au revoir à la charge mentale, la pression, etc, au moins dans le cas de ces loisirs.
« Waaa mais c’est super dur avec le gamin, la vache, tu fixes ta règle du jeu, ton horaire, et pis s’il fait pas comme tu veux tu le laisses en plan ? ? » Oui, bien vu ! Si vous avez tiqué là-dessus, je partage votre ressenti. Et j’avoue que, pour introduire l’exemple et aussi pour vous faire réagir, j’ai simplifié en omettant temporairement des concepts essentiels : la co-création et la négociation. Du coup oui, vous avez eu la version hard.
Dans la version soft, au lieu de brandir de manière péremptoire l’heure de départ de votre choix, vous amorcez la conversation sur le ton de la co-création et en annonçant clairement les motivations profondes derrière votre position. Quelque chose comme :
« Dis, ce soir j’aimerais vraiment pouvoir être à l’heure pour mon sport et ne pas stresser par rapport à ça, c’est vraiment important pour moi pour décompresser de ma semaine. J’aimerais qu’on parte à 18h pétantes, sinon il y a un risque qu’on soit tous les deux en retard et qu’on me refile Alfred. Est-ce que ça t’irait qu’on parte à 18h00 vraiment précises ? »
Notez déjà la différence avec un « je pars à 18h avec ou sans toi ». C’est mieux amené. Et on comprend le pourquoi derrière le besoin de ponctualité. Et puis je demande à l’autre son accord pour ce plan. Il peut très bien refuser l’accord en l’état mais proposer un amendement (« 18h05 car mon dessin animé préféré finit à 18h, mais je mettrai mon équipement dans la voiture à la pub autour de 17h30 pour gagner du temps »). Ou refuser de collaborer (« tu me fais iech avec tes horaires, barre-toi »), ce qui vous laisse avec votre meilleure alternative en l’absence d’un accord amiable : informer que vous partez à 18h pétantes, avec ou sans lui, mais que vous êtes ouvert à en parler plus tard si ça ne lui va pas. Notez la porte ouverte à une collaboration ultérieure, on est vraiment loin de la version hard.
Bon, et est-ce que ça « marche » tout ça ? Déjà, entre la version hard et la version soft, il y a un monde d’écart. Sur le ressenti, mais aussi sur l’aspect co-création. Pensez à la dernière fois où on vous a imposé (de force donc) une décision vous impactant, au boulot ou ailleurs. Par exemple, en période de coronavirus, l’interdiction de faire un pique-nique en famille dans le parc public immense et totalement désert à côté de chez vous alors que ces moments de connexion ensemble en plein air sont essentiels pour ne pas vous entretuer. Grr ! ! !
Et si vous aviez contribué, en concertation avec tous les riverains, à prendre cette même décision ? Que vous aviez participé aux discussions, et au final trouvé un accord permettant de respecter les besoins de chacun, bref, que vous ayez co-créé cette règle. Seriez-vous plus enclin à la respecter ? Je ne sais pas pour vous, mais pour moi le ressenti est totalement différent. Et l’engagement aussi. Dans un cas je subis (faute de mieux), dans l’autre je choisis et je construis. Même si au final on obtient textuellement la même décision (départ à 18h).
Précision importante : dans un esprit plutôt agile, on ne cherche pas une décision absolument génialissime, le plan de ouf qui fera qu’on arrivera à l’heure même en cas de tremblement de terre ou d’attaque d’aliens, mais juste un truc qui pourrait marcher sans faire trop de dégâts.
Une idée de solution qu’on peut tester assez facilement, et sur laquelle on peut aussi revenir si elle ne fonctionne pas ou si on a une meilleure idée. Ça fait moins de pression du coup hein ? Toujours en suivant l’exemple, votre fiston pourrait vous proposer de revenir de l’école directement chez un pote qui habite à côté de son lieu d’entraînement, et vous n’avez qu’à poser son équipement en passant lorsque vous allez à l’aquaponey. Ça satisfait tout autant vos besoins, et a priori encore plus les siens. Et si au contraire l’idée ne semble pas fonctionner (dans l’exemple : vous arrivez encore en retard, bonjour Alfred), eh bien on en reparle et on cherche mieux.
Au passage, voici une astuce pour aller encore plus loin : co-décider aussi un plan B. Qu’est-ce qu’on fait si jamais le jeune homme n’est pas dans la voiture à l’heure ? Est-ce qu’il est ok pour que je parte seul ? Encore une fois, c’est beaucoup plus facile d’accepter une décision qu’on a contribué à prendre, contrairement à une qui nous est imposée. Sans ce filet de sécurité, votre fils en retard aurait peut-être piqué une colère noire en constatant votre départ, et même s’il est le seul responsable de son timing raté, vous en aurait voulu pour ces négociations de m**de qui lui ont fait louper son entraînement, alors que d’habitude vous attendiez (certes à vos dépens) qu’il soit prêt pour partir. En co-décidant le plan B, vous mettez une sécurité supplémentaire pour tous.
Il serait injuste d’oublier la seconde partie du plan B : on fait quoi si VOUS n’êtes pas prêt à 18h ? Oui parce que c’est bien gentil de supposer que seul l’autre est faillible, mais c’est totalement injuste. Je suis prêt à parier que ça vous arrivera à un moment d’être en retard, avec les aléas de la vie. Et pour vous éviter d’éventuelles remarques sarcastiques (du genre « tu vois, tu me fais iech pour que je sois à l’heure, quand je le suis pas tu m’abandonnes, mais quand c’est toi c’est ok ? »), je vous conseille fortement d’aborder également ce point (qu’est-ce qu’on fait si vous n’êtes pas à l’heure) et de co-décider quoi faire dans ce cas.
Pour encore plus d’efficacité, je vous conseillerais même d’avoir cette discussion-là (quel plan B si vous ne respectez pas votre engagement) avant la précédente (quoi faire si l’autre ne respecte pas la décision commune). En faisant ainsi, vous montrez un exemple d’humilité et d’égalité de statut (« oui, je suis faillible comme toi »). Vous affirmez votre intention de trouver un accord qui, même poussé dans ses limites, continue de respecter autant que possible les besoins et la liberté de chacun. Et lorsque l’on commence par offrir autant de considération à quelqu’un, cette personne est alors infiniment plus disposée à ensuite nous rendre la pareille que si on s’y prend dans l’autre sens.
Si vous décidez de fonctionner ainsi, que vous stoppez toute tentative de contrôle et que vous proposez à la place de la collaboration, je vous parie que vous n’aurez plus les problèmes que je décrivais au début de ce texte.
Vos besoins seront plus aisément satisfaits. Vous n’aurez plus la charge mentale liée au fait de prendre à votre charge certaines parties de la vie des autres. Vous n’aurez plus à vous épuiser à faire obéir vos enfants. Et de fait, vos relations n’en seront que meilleures. Bien meilleures.
Bien sûr, vous avez le droit de penser que je vous vends du rêve. Car oui tout cela parait simple, parfois même évident sur le papier. Mais dans la vraie vie, il y a probablement toujours une bonne raison pour que « ça marche pas ». Faisons une métaphore : je peux vous expliquer en quelques dizaines de minutes comment lire des notes sur une partition pour les jouer sur un piano. Ça, c’est la théorie. Vous vous doutez bien que ça ne suffit pas du tout pour faire de vous un musicien accompli.
On ne progresse qu’en pratiquant. Beaucoup. Et au début, ça ne ressemble à rien, c’est hésitant, pas beau, parfois même on se décourage.
C’est normal. Il y a un fossé entre la simplicité théorique (appuyer sur les touches indiquées au moment lui aussi indiqué) et la concrétisation. Mais ceux qui persistent, qui acceptent l’imperfection et l’erreur, soit parce qu’ils aiment le challenge d’apprendre, soit parce que le jeu en vaut au final la chandelle, ceux-là seront récompensés.
Il en est de même pour les compétences de communication. Elles sont juste encore plus immatérielles que les compétences musicales. Qui plus est, notre environnement usuel (télé, école, entreprise, politique, etc) nous montre en priorité et en majorité les cancres du relationnel. C’est malheureusement peu commun dans notre culture que de respecter profondément son prochain, et de chercher à satisfaire nos besoins mutuels sans tenter d’avoir l’ascendant sur lui. Je vous invite à oser être dissident. Autant que je sache, être dans la norme – en d’autres termes « socialement acceptable » – ne rend pas forcément heureux. En tout cas infiniment moins que de bonnes relations familiales.